Le mur de graff de la rue Ordener

Dans le parcours du Street art nord-parisien, il y a un spot incontournable et consacré depuis de nombreuses années. C’est le mur de la rue Ordener, dans le XVIIIème arrondissement : un mur d’enceinte donnant sur la voie publique avec un large trottoir, haut de 3,50 m et long de 300 m environ, qui délimite une zone d’activité et de hangars appartenant à la SNCF. Facilement repérable, il se situe après le métro Marcadet-Poissonnière sur cette longue rue souvent embouteillée, juste avant le réseau de rails arrivant à la Gare du Nord et le pont du même nom. C’est le seul spot vraiment imposant de ce quartier qui jouxte la Goutte d’Or, et qui est en activité depuis des temps immémoriaux…

Lublin réveille le 18

Il se différencie par exemple du mur d’enceinte de la RATP, rue des Pyrénées dans le XXème, déjà par cette permanence, mais aussi par un certaine longévité des œuvres murales elles-mêmes. Elles peuvent en effet s’y fixer plusieurs années, chose assez rare dans le Street art qui est par essence très éphémère. Le renouvellement artistique se fait ici aussi, mais à un rythme plus lent. Est-ce la mainmise de certains crews sur la zone qui interdit l’intervention d’autres artistes « étrangers » dans le quartier ? Apparemment non puisqu’au hasard d’un trajet, j’y ai vu à l’œuvre un crew polonais, directement venu de Lublin pour investir en partie la place (Yuke Ronye & Co). Mais on y retrouve généralement des graffeurs connus des quartiers nord de Paris, tel Swen et l’équipe de Graffart, ou encore Shuck 2. On peut voir, sur les vestiges d’une œuvre collective – passée sous le nouveau graff polonais, un peu plus ambitieuse graphiquement parlant que l’ancienne –  une vingtaine de signatures réunies sous la bannière du 18, tandis qu’une autre œuvre aux gros lettrages carrés roses et au message ésotérique (93MC TAC TCP…) s’affirme fièrement du 93.

Ordener heavy heavy style

S’il y a un « style Ordener », il se caractérise par de très gros lettrages assez mastocs, qui couvrent entièrement le mur du sol à la bordure supérieure, et soulignent une approche 3D et monumentale du graff, dans un esprit assez « bétonné ». Sur ces grandes surfaces monochromes souvent vives viennent se rajouter des interventions discrètes (respect pour les ténors ?..) au feutre, quelques pochoirs intéressants. Les thèmes sont assez guerriers et violents en général et les interventions préparées sur croquis. D’autres parties sont beaucoup plus free style et semblent laisser le champ libre à l’expression d’artistes en herbe. On peut voir dans le diaporama ci-dessous la lente évolution de ce mur dans son ensemble sur deux ans. Il comporte en son centre, derrière un abri-bus, une partie plus haute (10 m environ) et expérimentale, qui se transforme à un rythme plus rapide.

Voici donc un tour d’horizon de ce rare spot situé dans la partie populaire du XVIIIème arrondissement. Ce mur reflète bien l’énergie puissante, concentrée et archi-urbaine du quartier ; ça décoiffe, c’est du lourd ! Mais on y sent un manque de renouvellement, contrairement à d’autres spots parisiens encore en activité. Cependant il y a un peu de frémissement et d’émulation dans la partie centrale du mur (le crâne aux fleurs est venu se surajouter au grand lettrage dynamique, deux nouveautés fulgurantes). Le graphisme devient à nouveau plus varié, et la poésie, l’humour, les messages de paix y trouvent des interstices d’expression, comme les pochoirs sur la longue partie bleu.

Ne loupez pas le diapo ci-dessous, avec pas moins d’une soixantaine de photos !

Florent Hugoniot

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